Le fil d’Ariane a permis à Thésée d’échapper au labyrinthe du monstre à la tête d’animal, le Minotaure. Après avoir tué le monstre, grâce au fil que sa bien-aimée lui avait remis et qu’il avait déroulé en s’engouffrant dans la grotte, il retrouva la sortie et la liberté sans encombre.
Quelques uns de ses derniers travaux sont exposés dans l’atelier d’un grand hall à Würzburg. Dans l’entrée, des sculptures de corps en métal accueillent les visiteuses et visiteurs.
Comme des pièces de design, tout juste décrochées de leurs supports, mais pas souples du tout, ils illustrent quel matériau l’artiste travaille : le métal. Pour être exact, il s’agit le plus souvent de fil de fer sous toutes ses formes. Elle en fabrique de très grandes sculptures, qui semblent malgré leur taille – grâce à leurs structures tissées – très fragiles. Le sculpteur Angelika Summa se voue corps et âme à ce matériau avec lequel elle travaille continuellement. Sous les flammes de son fer à souder se forment des pyramides, des boules, des cuboïdes, mais aussi des vêtements qui n’habillent rien ni personne. Avec son travail elle réussit à rendre visible une poésie très féminine, qu’elle transpose en un très grand format sculptural. Elle soude ses pensées, ses associations et ses enchaînements d’associations dans du métal. Que ce soit par des enquêtes plus profondes ou par les noms qu’elle donne à ses œuvres, tout cela amène les admiratrices et admirateurs plus loin que peut le faire la simple perception esthétique, la première impression. Comme si nous suivions le fil invisible, pas à pas se dégagent des relations et des significations profondes. « Unruhekissen » – le coussin du non-repos – serait un exemple de cette idée ayant pris une forme métallique de coussins qui empêchent de dormir. Ou « anticorps », des fils de cuivre que l’on ne voudrait surtout pas approcher de trop près. L’une de ses dernières œuvres, « Think Tank » peut être considérée comme un pars pro toto, un exemple qui explique la totalité de ses créations permettant ainsi de plonger dans sa conception artistique.
“ Think Tank – the message is inside” est le titre de la sculpture que l’artiste Angelika Summa a créée pendant le symposium à Schweinstall en 2009. D’une part cette œuvre porte indéniablement son écriture artistique et d’autre part, après une première impression on découvre une structure d’une profondeur telle, qu’il est pratiquement impossible de l’explorer dans sa totalité. D’épaisses cordes métalliques se posent les unes par-dessus les autres, les unes dans les autres, comme d’innombrables circonvolutions cérébrales au dessus d’un centre stable, formé de cubes. La grande forme, un cube haut de deux mètres dans lequel s’inscrivent ces tortillements reprend le petit cube du centre, même si ses bords ne peuvent être retracés avec une règle. En règle générale on désigne avec « Think Tanks » des « usines de pensées » qui se rencontrent pour réfléchir ensemble aux différents problèmes de la société et pour trouver des solutions. Mais ces solutions ne sont pas automatiquement réalisées. Think Tanks ont besoin d’une entité supérieure qui donne vie à ces idées et qui les rend actives. On peut retrouver tous ces différents niveaux qui peuvent être considérés comme une possibilité d’interprétation dans l’œuvre d’Angelika Summa. Ce fait est illustré par la façon dont s’imbrique le tout autour d’un centre bien défini dans le « Think Tank » de l’artiste.
L’endroit où se trouve ce travail, à savoir devant le cimetière de Queidersbach, évoque encore d’autres contenus de cette œuvre. Le nom « programmatique » donne bien une direction de pensée, comme c’est le cas pour toutes les œuvres de Summa, mais ne restreint en rien l’interprétation de ceux qui les contemplent. A cet endroit qui se prête à s’interroger sur les questions clés de notre vie, la sculpture de Summa renforce le processus de réflexion : En quoi consiste au fond le centre de nos propres pensées et de notre propre vie ? Est-il possible d’entrer dans les pensées d’un autre être aussi proche de nous soit-il ? Y a-t-il un sujet, une idée une motivation « derrière » ou « devant » toutes ces pensées ? Le centre de toute pensée est-il l’amour ou la haine ? Est-ce que ce sont les conséquences, nos actes, qui sont le résultat visible du processus d’assimilation qui restent dans notre « black box » ? Et si c’est le cas, est-ce que ce constat influe sur nos comportements, sur nos relations aux autres ? Le Think Tank pose plus de questions qu’il n’apporte de réponses. Les pensées semblent être infinies – comme les tortillements du fil de fer, sans début ni fin.
Le métal, les fils qui constituent les sculptures vont rouiller avec le temps. Mais le noyau autour duquel tout s’articule résistera plus longtemps à la corrosion grâce à un traitement spécial. Ce processus de vieillissement fait intentionnellement partie de la conception de l’œuvre et s’approche donc de mouvements comme le « land-art », où la modification de l’œuvre artistique est partie intégrante de sa perception et de son processus d’expérience. Il permet aussi le parallèle à notre propre disparition et rend une étincelle d’espoir possible. Un espoir relatif à notre propre centre, notre noyau qui semble être prisonnier entre la tension de l’éphémère et la vie éternelle.
Angelika Summa tient son fil d’Ariane fermement dans sa main. Mais elle offre à chacune et à chacun la possibilité de partir pour un voyage de découverte vers l’intérieur profond de son labyrinthe artistique dans lequel il n y a pas de Minotaure mais plutôt des prises de conscience qui finissent par nous accompagner en toute sécurité à l’extérieur – dans nos propres labyrinthes de vie.
Du 28 février au 31 mars vous aurez une autre occasion de faire connaissance avec les œuvres de Summa : Au hall des machines Zeche Scherlebeck à Herten, seront exposées des œuvres récentes de l’artiste. Cette exposition s’intitule : « Travaux manuels »
D’autres informations : href= »https://www.herten.de/index.php?id=2570″ target= »_blank »>hier
Le hp de Angelika Summa: https://www.angelika-summa.de/index.html
Texte traduit de l’allemand par Andrea Isker
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