dans ma maison

Sandra Denis et Orianne Bernard dans une pièce de Philippe Dorin (C) Cie Sémaphore


Dans sa chambre, une petite fille est en train de dessiner sa maison sur des feuilles de papier. Elle imagine comment pourrait être cette petite maison dans laquelle elle vivrait un jour, dans laquelle elle pourrait se sentir bien. Elle décrit en quelques mots ce qui se passe, elle commente ses dessins et les met en bonne ordre. « Eteins » dit-elle juste avant de dormir et tout à coup on est dans le noir. « Allume » ordonne une voix qui ressemble à celle de la petite fille, quoi qu’elle semble être plus mûre. Un instant plus tard on découvre – extrêmement surpris – qu’une femme âgée aux cheveux gris a remplacé la petite fille.
La mise en scène très astucieuse de la pièce « Dans ma maison en papier j’ai des poèmes sur le feu » écrite par Philippe Dorin est l’œuvre de Denis Woelffel. La représentation a eu lieu au TJP, au théâtre pour la jeunesse à Strasbourg.
Au fond, c’est une pièce pour enfants, mais les adultes aussi y trouvent leur compte, car derrière le langage simple se cache un deuxième niveau de lecture bien plus complexe.
Dorin a écrit un texte lyrique, merveilleux, qui parle de la mort. Il parle de ce qui est éphémère et de ce qui restera, peut-être – ou peut-être pas ! Rien n’est enjolivé, mais malgré tout, personne n’a peur. La petite fille, l’alter-ego enfantin de la femme attendue par la mort qui veut lui offrir des roses qu’elle refuse, se rebelle contre la fin qui est si proche. Elle rallume la lumière encore et encore, comme le font les enfants qui ont peur dans le noir et qui essaient par toutes sortes de subterfuges de repousser la mort qu’ils pressentent sans savoir de quoi il s’agit réellement.
«As-tu faim ? As-tu soif ? As-tu froid ? As-tu peur ? » A toutes ces question que la fille pose à la vieille femme, celle-ci peut répondre que non, tout en essayant d’expliquer ce que c’est que la mort. Des pensées consolatrices qui cherchent à faire saisir l’insaisissable.
Orianne Bernard et Sandra Denis sont touchantes dans leurs rôles respectifs de la petite fille et de la vieille dame qui sont plus étonnées qu’apeurées de remarquer la mort qui « rode » en pantalon court avec un petit chapeau noir sur la tête.
Dorin, qui écrit essentiellement pour les enfants a concilié l’inconciliable : Parler en même temps des peurs réelles des enfants et du détachement progressif de la vie que manifestent les personnes âgées et réussir à entremêler les deux récits de façon très complexe dans un texte qui paraît à première vue tout simple.
Même au moment où la vieille dame tient toutes les roses sous forme d’un bouquet dans sa main et que la lumière s’éteint pour la toute dernière fois, il ne reste ni peur ni amertume.

Texte traduit de l’allemand par Andrea Isker

Dieser Artikel ist auch verfügbar auf: Allemand